Ce discours de clôture des activités de la Cour Constitutionnelle pour l’année 2022 et d’ouverture de celles de l’année 2023, a été prononcé par le Président de cette Institution au cours de son audience solennelle de rentrée le 3 mai 2023 au Palais de la Constitution en présence du Chef de l’Etat Ali Bongo Ondimba et d’autres personnalités du pays et du continent. Le hasard de calendrier a bien voulu que la Première Rencontre des Femmes Africaines Juges, prévue de longue date pour se tenir à Libreville, ait lieu au même moment que se tenait cette audience solennelle de rentrée de la Cour Constitutionnelle, donnant ainsi l’honneur et le bonheur au Gabon de recevoir des délégations venues de plus d’une trentaine de pays africains ainsi que des représentant et experts des organismes spécialisés des Nations Unies. Votre journal en ligne panafricain vous donne en intégralité ce discours riche et interpellateur pour un Gabon de paix, uni et prospère. Un document à conserver.
Discours de Madame Marie Madeleine MBORANTSUO, Président de la Cour Constitutionnelle à l’occasion de l’audience solennelle de rentrée de l’institution.
« L’audience solennelle de rentrée de la Cour Constitutionnelle est ouverte. »
Excellence Monsieur le Président de la République, Chef de l’Etat,
C’est pour nous, juges constitutionnels, un privilège de compter parmi nos illustres invités, à l’occasion de l’audience solennelle de rentrée de la cour constitutionnelle, le premier magistrat de la république que vous êtes, par ailleurs gardien politique de la constitution. Votre présence chaque année en ces lieux est donc la manifestation de vitre attachement aux principes républicains et surtout, l’expression de la place prépondérante que vous conférez à la loi fondamentale dont la cour constitutionnelle en et la gardienne juridique.
Pour cet appui d’aujourd’hui comme pour celui de tous les instants, nous tenons à vous rendre , monsieur le président de la République, un vibrant hommage et vois renouvelons par la même occasion notre déférence et profonde gratitude ;
Madame le vice-président de la République, monsieur le Premier Ministre, Chef du gouvernement, monsieur le président du Conseil économique, social et environnemental,
Vous venez d’être élevés à ces très hautes fonctions de l’Etat par Son Excellence monsieur le président de la république. C’est donc pour la première fois que vous prenez part au titre de vos nouvelles fonctions respectives, à l’audience solennelle de rentrée de la cour constitutionnelle, soyez-en sincèrement félicités et remerciés.
Madame le président du Senat, monsieur le président de l’assemblée nationale, mesdames et messieurs les membres du gouvernement, mesdames et messieurs les chefs de Cours,
La Cour Constitutionnelle voudrait relever, pour s’en satisfaire, la constance avec laquelle vous prenez part à ses audiences solennelles ainsi qu’aux autres activités qu’elle organise, soulignant ainsi tout intérêt, que vos institutions portent au rôle du juge constitutionnel dans la stabilisation et la consolidation de l’Etat de droit ; veillez trouver ici l’expression de notre amitié et de notre reconnaissance.
Excellences, Mesdames, Messieurs les Ambassadeurs et représentant des organisations internationales régionales et sous régionales,
Nous voulons saluer votre présence renouvelée à chacune de nos assises, présence qui traduit assurément l’intérêt que vous n’avez jamais cessé d’accorder à l’ensemble des institutions de notre pays et singulièrement à la cour constitutionnelle.
Nous ne doutons pas que les liens qui unissent notre pays aux vôtres ainsi qu’aux institutions que vous représentez iront, de ce fait, en se renforçant ; la cour constitutionnelle vous en sait gré ;
Nous voulons également saluer la présence parmi nous de Monsieur Mamadou Badio CAMARA, Président du Conseil Constitutionnel de la République du Sénégal et Monsieur Dieudonné Kamuleta BADIABANGA, président de la cour constitutionnelle de la République Démocratique du Congo qui nous ont fait l’honneur et l’amitié de répondre favorablement à notre invitation.
Monsieur le Président de la République, Excellences, Mesdames et Messieurs,
Le hasard de calendrier a bien voulu que la Première Rencontre des Femmes Africaines Juges, prévue de longue date pour se tenir à Libreville , ait lieu au même moment que se tient l’audience solennelle de rentrée de la cour constitutionnelle, nous donnant ainsi l’honneur et le bonheur de compter parmi nous des délégations venues de plus d’une trentaine de pays africains ainsi que des représentant et experts des organismes spécialisés des nations unies tels l’ONU femmes, l’ONUDC, le PNUDP et bien d’autres organismes.
Dans ce cadre, nous saluons la présence réconfortante parmi nous des présidents et hauts magistrats des juridictions constitutionnelles pénales, civiles, administratives et financières du continent africain.
Chères collègues, Mesdames, et Messieurs les Présidents et Juges,
Quoique séjournant à Libreville dans le cadre de de la tenue des premières assises des femmes africaines juges, vous nous avez fait l’amitié de vous joindre à nous, rehaussant ainsi par votre présence l’éclat de la présente cérémonie. Votre présence à l’audience solennelle de rentrée de la cour constitutionnelle est un témoignage vivant de relations excellentes, au plan bilatéral come au plan multilatéral, qu’entretiennent nos juridictions et de l’esprit de solidarité qui prévaut entre les juges africains.
Soyez-en sincèrement remerciés.
Excellence, Monsieur le Président de la République,
Mesdames et Messieurs
La loi fondamentale confie à la cour constitutionnelle un domaine de compétence très étendu. Du contrôle de la constitutionnalité des louis et des actes règlementaires, à la régularité des élections, de la garantie des droits fondamentaux de la personne humaine et les libertés publiques à la régularité du fonctionnement des institutions et de l’activité des pouvoirs publics et j’en passe.
Dans ce cadre, la cour constitutionnelle a rendu, tout au long de l’année écoulée, des centaines de décisions et émis plusieurs avis, sur requêtes tant des autorités compétences que de personnes physiques et morales ; la portée de ces actes juridictionnels fait l’objet du rapport annuel destiné au président de la république, au président de la l’assemblée nationale, au président du Senat conformément à la loi et communiqué pour suivi au premier ministre chef du gouvernement.
Monsieur le Président de la République,
Excellences Mesdames et Messieurs
Il vous souviendra que la cour constitutionnelle, en prévision des échéances électorales prévues pour se tenir cette année 2023, avait invité mes acteurs politiques, dans la mesure où ces derniers percevaient la, nécessité d’apporter quelques refermes au code électoral, de se retrouver suffisamment à temps afin de permettre aux pouvoirs publics compétents de traduire en actes normatifs les éventuelles corrections des différents textes portant code électoral dans notre pays.
C’est encore une fois pour nous l’occasion d’adresser à Son Excellence Monsieur le Président de la République ALI BONGO ONDIMBA, nos vifs et sincères remerciements pour avoir répondu favorablement à l’appel de ses compatriotes en convoquant la concertation politique à laquelle ont pris une part active les acteurs politiques de la majorité et ceux de l’opposition. Cette concertation, dont l’objectif visé était l’organisation des futures élections aux lendemains apaisés, a débouché sur plusieurs reformes dont l’une des plus importantes reste l’harmonisation de la durée des mandats électoraux des sénateurs et des élus locaux naguère préconisée par la cour constitutionnelle.
En effet, le Senat étant la chambre du parlement représentant les collectivités locales, le grand écart entre la durée du mandat des sénateurs et celui des élus locaux a été pendant des longues années, à l’origine des situations pour le moins incongrues. Il y a lieu de relever, à ce sujet qu’alors que certains sénateurs avaient perdu leur mandat d’élu local, seul lien qui les unissait à la collectivité locale qu’ils étaient censés représenter, ils continuaient pourtant de siéger au Senat. La reforme ainsi adoptée récemment permet dorénavant d’organiser l’élection des membres des conseils départementaux et des conseils municipaux quelques mois avant l’élection des sénateurs pour laquelle ces élus locaux sont soit grands électeurs, soit candidat au poste de sénateur de ka circonscription électorale concernée.
Monsieur le Président de la République,
Mesdames et Messieurs
Au cours de la même audience solennelle tenue en 2022, la cour Constitutionnelle avait pris l’engagement, comme elle l’avait déjà fait en 2015, de sillonner tout le territoire national, mais aussi certains pays amis dans lesquels on retrouve une importante communauté de nos compatriotes, en vue de familiariser le plus grand nombre de citoyens avec la matière électorale.
Ainsi, pendant plusieurs mois, la cour Constitutionnelle est sortie de ses murs ; ses membres ont quitté leur toge d’audience, pris le bâton de pèlerin du droit pour partir, par monts et par vaux, informer au plus près toutes les couches sociales de notre pays sur les règles qui encadrent le processus électoral. La présence des juges auprès des populations visait à combler un déficit de formation, d’éducation et d’information qui a souvent malheureusement conduit à des errements et surtout à des violences au lendemain de différentes consultations électorales.
La campagne de sensibilisation sur le processus électoral annoncée a débuté le 5 décembre 2022.
La cour constitutionnelle se félicite d’ores et déjà des résultats de ces différentes rencontres qui, au regard de l’affluence constatée, des débats sans tabou qui en ont découlé, des réponses précises et complètes apportées par les juges à toutes les interrogations portant sur les différentes phases du processus électoral, ont incontestablement contribué à dissiper bien de malentendus , à anticiper, sinon écarter d’éventuels contentieux lesquels trop souvent, résultent d’une méconnaissance totale de la législation en matière électorale. Même si, il faut le reconnaitre, dans cette matière qui se veut éminemment politique, l’ignorance cède le plus souvent le pas à la manipulation voire à la mauvaise foi.
Excellences Mesdames et Messieurs,
Permettez-moi une fois de plus de rappeler pour marquer les esprits de tous, les points essentiels à retenir du processus électoral.
La première phase du processus électoral porte sur la liste électorale établie certes par l’administration, en en l’occurrence le ministère de l’intérieur mais sous la supervision des représentants du Centre Gabonais des Elections.
La deuxième phase du processus électoral est placée sous l’autorité exclusive et la responsabilité directe du Centre Gabonais des Elections lequel gère l’ensemble des opérations électorales par le biais de ses démembrements à savoir : les commissions provinciales, départementales, communales d’arrondissements ou consulaires, en cas d’élection présidentielle. A ce stade, il y a lieu de rappeler, pour le souligner, que le Centre Gabonais des Elections est l’organe indépendant et permanent qui gère toutes les opérations électorales au Gabon. Dirigé par un président élu par un collège spécial, comprenant des membres désignés à parité par les partis politiques de la majorité et ceux de l’opposition le centre Gabonais des élections comprend en outre d’autres membres désignés également à parité par les deux camps politique. La composition de ses démembrements jusqu’au bureau de vote répond au même principe de la gestion paritaire de l’élection par les deux camps politiques. Cette spécificité gabonaise qui vaut son pesant d’or, mérite d’être mise en exergue car est remarquable la rareté d’une telle structure ainsi composée sous d’autres cieux.
La responsabilité des partis politiques de la majorité et ceux de l’opposition est donc interpellée quant au choix des hommes et des femmes qu’ils désignent au sein de ses instances en charge des opérations électorales locales et des bureaux de vote jusqu’à l’annonce de l’ensemble des résultats électoraux au public par le président du Centre Gabonais des Elections.
Quant à la troisième phase laquelle intervient après la centralisation de l’ensemble des résultats et leur annonce au public par le Centre Gabonais des élections, hormis la proclamation desdits résultats, du reste déjà connus de tous par la Cour Constitutionnelle, ou le Conseil d’Etat, laquelle est un acte juridictionnel obligatoire, le contentieux électoral par contre n’est pas obligatoire. En effet, un candidat malheureux peut délibérément décider de ne pas élever devant le juge de l’élection une contestation des résultats.
Excellences, Mesdames et Messieurs
La Constitution de la République gabonaise reconnait et consacre les valeurs traditionnelles et le patrimoine culturel de notre nation.
Souvenez-vous que la Cour constitutionnelle toujours dans son adresse au public pour l’année 2022 avait invité les pouvoirs publics à inscrire au panthéon certaines grandes figures de l’histoire de notre Nation en aménageant un espace spécial qui leur est dédié.
Aussi, sommes-nous honorés et profondément émus d’annoncer le démarrage prochain des travaux de construction du mémorial Omar Bongo Ondimba. C’est le lieu pour nous de renouveler à Son Excellence Monsieur le Président de la République, nos vifs remerciements pour avoir prêté une oreille attentive à la préoccupation de la Cour Constitutionnelle.
Ce devoir de mémoire, soulignons-le, est l’expression manifeste de la reconnaissance éternelle de la Nation à l’égard de ceux de ses enfants qui ont, à travers des actes hautement particuliers, contribué de manière exceptionnelle à, la construction de notre Nation.
Monsieur le Président de la république,
Excellences, Mesdames et Messieurs,
La rentrée solennelle qui ouvre une année d’échéance électorales reste toujours un moment particulier en ce sens que l’élection constitue le moyen d’expression essentiel de la souveraineté du peuple. Dans une démocratie, elle reste, quelque soient ses carences, la principale modalité de participation des populations à la vie politique.
Aussi de tous les moments de la vue de la Nation, aucun ne doit bénéficier de plus d’attention, autrement dit ne doit être entouré de plus de garanties.
Nous devons porter notre regard bien au-delà d’une échéance électorale car l’enjeu d’une élection dépasse largement le seul changement de titulaire du pouvoir politique. ; le il est et demeure un instrument de mesure de notre adhésion à un système démocratique et cette question pour une nation, importe bien plus que le choix en faveur de tel ou tel candidat.
Nous devons en permanence avoir à l’esprit, quelque soient nos convictions politiques, qu’il y a toujours un intérêt supérieur qu’il faut à tout prix préserver. C’est notre bien commun le plus précieux, notre bien le plus cher : la paix.
Car la paix est le socle de tout notre édifice normatif, de notre système de protection des droits et en définitive de notre système social.
Nous dévons tous être conscients, de ce que seul un pays en paix peut porter un régime démocratique et garantir le droits et libertés fondamentaux.
La paix, rappelons-le, est un droit. Ce n’est pas un vain mot. Les grandes déclarations de droits de l’homme ont chacune, à sa manière, consacré ce droit.
Ainsi, en est-il, de la Charte Africaine des droits de l’homme et des peuples ou encore de la Déclaration sur les droits des peuples à la paix qui « proclame solennellement que les peuples de la terre ont un droit sacré à la paix ».
Ce droit à la paix doit être bien compris et ce de manière englobante, et doit se réaliser à travers toutes ses composantes, notamment le droit à la vie, le droit à la dignité, et enfin et surtout le droit à la sûreté. Le droit à la paix est donc indispensable à l’effectivité de nos droits et libertés fondamentaux.
Paix, droits et libertés fondamentaux, démocratie, élections pluralistes, tous ces éléments, qui ont constitué le fil de mon propos du jour, sont indéfectiblement liés ; ils sont totalement interdépendants.
Mesdames et Messieurs,
Il était plus que nécessaires, à la veille des prochaines échéances électorales, de rappeler à tous des principes afin que nous gardions à l’esprit la responsabilité qui incombe à chacun quel que soit son niveau d’engagement républicain.
Pour clore mon propos, permettez-moi de paraphraser Jean Jaurès : « Qu’est-ce donc la République ? C’est un grand acte de confiance. Instituer la République, c’est proclamer que des millions d’hommes sauront tracer eux-mêmes la règle commune de leur action ; qu’ils sauront concilier la liberté et la loi, le mouvement et, l’ordre ; qu’ils sauront se combattre sans se déchirer ; que leurs divisions n’iront pas jusqu’à une fureur chronique ».
Excellences, Mesdames et Messieurs,
Je vous remercie pour votre aimable attention.
Je déclare closes les activités de la Cour Constitutionnelle pour l’année 2022 et ouvertes celles de l’année 2023.
L’audience solennelle est levée.