Le 17 janvier 2025 à trois heures du matin à Biba les populations en colère, ont pris le contrôle de la route en bloquant la circulation. Intervention des autorités et forces de l’ordre, interpellation des manifestants, une session du Conseil municipal de Campo perturbée. Au cœur de cette grogne des populations, « le non respect du cahier de charge » signé entre l’agro-industrie Camvert, les sociétés forestières Boiscam, Sofoni et les communautés villageoises de l’arrondissement de Campo, frontalier avec la Guinée Equatoriale dans la région du Sud du Cameroun. Ce que l’on sait au lendemain de ces événements. Récit.
Malgré le calme apparent dans cet arrondissement de 19 villages, la tension persiste. Suite aux événements survenus le vendredi 17 janvier 2025 à 3h du matin à Biba. En effet ce jour, les jeunes en colère avaient bloqué la route empêchant la circulation. A l’origine de ce mouvement d’humeur, « le non respect du cahier de charge » signé par les trois grandes Sociétés implantées dans cet arrondissement avec les communautés villageoises notamment les peuples autochtones Bagyelis, la communauté Iyassa, la communauté Mvae-Mabi.

Dans une pétition contre les trois grandes entreprises signée le 20 novembre 2024 et adressée au sous-préfet de Campo Bamock Francis Igor, les populations riveraines et souveraines du Canton Mvae-Mabi dans l’arrondissement de Campo ont fait plusieurs dénonciations :
Contre la société agroindustrielle Camvert, les populations dénoncent: «Violation des droits de la communauté riveraine Mvae-Mabi ; Non-respect des obligations préétablies du cahier de charges ; Non aboutissement du PTA exercice 2023 ; Non existence du PTA exercice 2024 ; Trafic d’influence sur les autorités traditionnelles ; Irresponsabilité notoire dans la prise en charge des accidents de travail ; Dégradation de l’écosystème : destruction des champs villageois par les éléphants ».
Dans leur pétition, les populations de Campo sont contre la société forestière Boiscam pour « Violation des droits de la communauté riveraine ; Pillage forestier hors zone d’exploitation ; Non existence d’une politique conventionnelle (cahier de charges) ; Non versement des redevances foncières ». Pour ce qui est de la société forestière SOFONI la population est contre elle pour « Violation des droits de la communauté riveraine ; Pillage forestier hors zone d’exploitation ; Non existence d’une politique conventionnelle (cahier de charges) ».
En décembre 2024, les populations avaient déjà manifesté pour dénoncer le non respect de leurs engagements par les autres parties prenantes. La manifestation du 17 janvier 2025 a donc été l’occasion pour ces populations de faire entendre leurs voix, leurs cris et pleurs.
Interpellés par les forces de l’ordre, les manifestants ont été conduits à la brigade de Campo le jour même où devait se tenir une session du conseil municipal. Solidaires, les conseillers ont décidé de boycotter les travaux si les jeunes n’étaient pas libérés. Ces travaux ont finalement débuté après leur libération. « Par rapport à leur détention, ils n’ont pas fait une journée là-bas c’était une demi-journée. Les conseillers municipaux ont décidé que si on ne les libère pas il n’y aura pas conseil » raconte un jeune de Campo. Outre le non respect du cahier de charges, les jeunes de Campo revendiquent de « postes fiables » à Camvert. « Ils emploient les gars de campo comme de simples ouvriers ce sont eux qui doivent creuser les trous et planter » s’insurge un jeune de Campo. Pour lui les postes de Directeur des ressources humaines, et d’Assistants de la plantation devraient revenir aux natifs de l’arrondissement.

« Cette revendication a été depuis déclarée, moi-même j’ai été cité chez le préfet de Kribi, là où j’ai été menacé et intimidé est ce qu’on est allogène au Cameroun ou bien nous sommes citoyens camerounais ? Moi je crois que tout un citoyen camerounais a la possibilité de revendiquer ses droits. La revendication ne doit pas être une menace…si un citoyen camerounais revendique quelque chose sans toute fois menacer, il ya pas de casse, pas de violence. Moi mon message c’est que populations de Campo, ou nous sommes camerounais nous sommes allogènes ici à campo ça c’est mon message….Nous, on ne veut pas la violence le Cameroun est un pays de droit. Si quelqu’un revendique sa chose si tu as pris sa chose, il dit que c’est pour moi tu dois le lui remettre, l’intimidation moi en tant que Majesté je refuse ça » explique Sa Majesté Ondo A. Pie Parfait le chef de 3e degré du village Bitandé-Assok. « Sur plus de 300 projets qu’on a demandé il ya eu seulement un seul projet de forage à Mabiogo, le reste RAS, rien à signaler. Même le salaire mensuel prévu dans le cahier de charge jusqu’à présent personne n’a perçu 100 francs de ça…notre salaire c’est l’intimidation à la préfecture de kribi » poursuit cette autorité traditionnelle.

Pour sa part, le chef de 3è degré du village Malaba, Sa Majesté Mette Dieudonné explique : « Nous voulons que Camvert marche comme on a commencé au début, on ne dit pas que nous ne voulons pas Camvert. Au niveau de ma chefferie de Malaba, j’ai demandé le forage, rien. La case de passage, rien. Les écoles, rien ». Le plus ancien des chefs du village de Campo(en service depuis 2004), qui a demandé un forage et un hangar poursuit : « Camvert au début était très bien avec nous les chefs. Après un moment ils nous ont lâché, c’est environ quelque chose de trois ans aujourd’hui on ne voit même plus Camvert. Bien après monsieur Aboubacar était ici depuis deux semaines ; il a dit, à partir de février mars, nous donner tout ce qu’on a demandé notamment les forages » dit-il.
Face à cette grogne, une réunion est prévue dans les prochains jours afin de trouver des solutions définitives de sortie de crise, indique une source.
A Campo, les populations espèrent que les différentes parties fumeront enfin le calumet de la paix pour un meilleur développement de cet arrondissement et pour le bien-être de ses populations.
Ericien Pascal, à Campo.